1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz

LE CLIMAT DU VIGNOBLE DE CHAMPAGNE

toujours contestables. Le météore dévastateur est d’allure capricieuse. Il frappe impitoyablement une commune et épargne l’autre sans qu’on puisse savoir toujours pourquoi. Aussi lorsque les artificiers vignerons se réjouis­ saient de ce qu’ils considéraient comme un succès, leurs adversaires répon­ daient que l’orage n’eut rien dévasté non plus si on n’eut pas tiré; et l’ar­ gument était difficile à réfuter. Dans certaines communes de la Vallée de la Marne où la grêle sévit assez souvent, les vignerons affirment que des dégâts graves étaient de règle tous les deux ou trois ans avant qu’on ait essayé la lutte par les explosifs. Pendant toute la période où le tir des fusées fut en honneur, de 1909 à 1914, il n’y eut pas de dégâts sérieux. Depuis, elle est revenue de temps à autre commettre des dévastations qui, dès 1920, attiraient notre attention. Personnellement nous avons pu suivre avec quelques précisions l’action du tir les II et 19 Juin 1912. Des orages de grêle bien caractérisés et d’une grande violence ont couvert en ces deux journées la plus grande partie du vignoble de la Marne; pourtant les dégâts furent très faibles. De la plaine agricole qui s’étend devant les vignobles on pouvait croire, le 19 Juin, que tout était détruit* .Les nuages énormes, gris plombé, à bordure déchiquetée, grisâtre, à bruissement de grêle, zébrés d’éclairs, semblaient parfois s’arrêter dans leur marche, stationner au-dessus des coteaux d’où on les attaquait sans trêve. Un peu au sud d’EPERNAY, au moment où ils atteignaient une zone plus couverte de postes de tir, une grosse masse s’en détachait comme arrachée et venait former un orage satellite au-dessus de CHALONS-SUR-MARNE auquel venaient bientôt s’ajouter de nouvelles masses orageuses détachées de la côte de BOUZY. Y avait-il seulement coïncidence ? Il est permis d’en douter. Les postes ayant été détruits pendant la guerre de 1914-1918, nous n’avons pu, malgré nos efforts, réorganiser la lutte sous la forme collective et généralisée qu’elle avait prise avant 1914. Mais, depuis 1939, la question semble avoir été étudiée et -surtout avoir progressé grâce à un aviateur audacieux et dévoué, le Colonel RUBY, qui a poursuivi des essais méthodiques dans le Beaujolais, si souvent visité par les orages de grêle. Les éléments nouveaux consistent surtout en ce fait que depuis 1936 des aviateurs sont allés voir dans les nuages orageux ce qui s’y passe, et que depuis 1936 c’est une véritable défense stratégique qui a été organisée en Beaujolais grâce au concours actif de l’aviation de LYON-BRON. Sous la direction du colonel RUBY a été créé le premier centre national de défense contre la grêle dont les premiers résultats ont fait l’objet d’une brochure éditée par l’Institut des Etudes Rhodaniennes et intitulée « Nou­ velles études sur la grêle ». Pour le colonel RUBY, trois phénomènes peuvent contribuer à la for­ mation de la grêle :

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