1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz

Les vignes françaises avant l’invasion phylloxérique étaient cultivées d’une façon toute particulière dans les arrondissements de REIMS, d’EPER- NAY et dans le canton de VERTUS qui constituaient le grand et classique vignoble de Champagne. Nous rappelons ici ces pratiques dont les tradi­ tions doivent être évoquées lorsqu’on étudie les transformations que la reconstitution par la greffe et les difficultés modernes ont imposées. Les vignes étaient cultivées « en foule » dans la vallée de la Marne, et souvent « en roules », c’est-à-dire en lignes plus ou moins droites, dans la montagne de REIMS. Cette différence dans la disposition des souches provient d’une différence de méthode dans la conduite de la vigne après la plantation. Dans tout le pur vignoble de Champagne, la plantation était faite en lignes transversalement à la pente à raison de 20.000 pieds environ par hectare. Dans la vallée de la Marne on laissait à chaque cep, à la troi­ sième année deux ou trois bras de 50 à 80 centimètres de longueur et on provignait séparément chacun de ces bras en ne laissant sortir du sol que leur extrémité. Ce travail s’appelait « l’assizelage » ; après son exécution la vigne était en foule, c’est-à-dire plantée sans aucun alignement des souches. Dans la Montagne de REIMS, on conservait souvent la vigne en routes, en la couchant en terre chaque année de façon à faire avancer chaque route, mais sans détruire tout à' fait l’alignement transversal. Les travaux annuels de la vigne commençaient en Février à la taille. Tous les sarments étaient coupés au ras du bois de deux ans, sauf un seul généralement choisi parmi les plus élevés. On taillait celui-ci à trois, quatre cinq yeux suivant la vigueur du cépage et la fertilité du sol. La taille était suivie en Mars-Avril par la bècherie, exécutée avec une houe à bras de forme spéciale. Chaque fois que le vigneron arrivait à hau­ teur d’une souche, il la couchait à 10 ou 15 cm. en terre et ne laissait sortir que le sarment qui venait d’être taillé à trois, quatre ou cinq yeux. Tout le bois de deux ans disparaissait ainsi en terre par une sorte de provignage annuel. Les échalas qu’on enlevait avant l’hiver pour les empiler en tas spé­ cialement aménagés qu’on appelait « moyères » étaient fichés à nouveau contre chaque « broche » ou sarment conservé à la taille aussitôt la bêche- rie terminée.

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