1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz

LES CÉPAGES AYANT DROIT A L’APPELLATION CHAMPAGNE Les raisins blancs existaient en Champagne bien avant qu'on eut songé à faire mousser le vin en bouteilles. D’après le bulletin du Labora­ toire expérimental de Viticulture et d’Œnologie de la Maison MOET & CHANDON, Tome 2, p. 400, les religieux de ST-MARTIN-D’EPERNAY connaissaient en 1561 trois sortes de vin, le blanc, tiré des raisins blancs, le clairet et le rouge. M. COUVREUR-PERIN pense que les Vignobles de la « Côte Blanche que les raisins blancs y régnaient. Nulle part, écrit-il, on n’a rencontré ni signalé aucun changement dans l’encépagement (« Vigneron Champenois » du 15 janvier 1926, p. 20). Mais, jusqu’à l’apparition des vins mousseux, les raisins blancs étaient considérés en Champagne comme bien inférieurs aux raisins noirs. Les crus magnifiques de la Côte blanche n’étaient jamais cités. M. COU- VREUR-PERIN cite un état des paroisses de la généralité de CHALONS par l’Election d’EPERNAY où, en 1691, CHOUILLY et CRAMANT sont cotés l’Association Viticole Champenoise à l’époque où j’avais l’honneur d'en diriger les travaux et qui était très intéressant lorsqu’il évoquait ses sou­ venirs de jeunesse champenoise, se rappelait avoir connu des négociants qui avaient conservé une certaine réserve dans l’utilisation des « blancs de blancs ». On estimait même jadis qu’il ne fallait pas les mélanger aux blancs de raisins noirs. Dans sa « Topographie de tous les vignobles connus » (Edition de 1816, p. 35), A. JULIEN classe encore les vins de raisins blancs de la Côte des blancs en 28 classe, mais reconnaît pourtant qu’ils ont « de la douceur, beaucoup de finesse, de légèreté et d’agrément » et que, « mélés avec ceux d’AY et autres vignobles de la première classe, ils font des vins mousseux qui réunissent toutes les qualités que l’on estime dans ceux de cette espèce ». Mais dans toutes ces citations, on ne précise pas la variété de raisin blanc. M. COUVREUR-PERIN identifie le Chardonnay avec « l’Epinette blanche » que signale le Docteur GUYOT en 1865 dans son étude bien connue sur les vignobles de France. C’est seulement en 1851 qu’on trouve semble-t-il, pour la première fois le nom de « Chardonnet » dans le glos­ saire de f’Abbé TARBE, intitulé et du patois de Champagne » (Tome 2). Mais il est probable que le Pinot blanc Chardonnay est lui aussi très ancien en Champagne. A mesure que disparaissaient les vins rouges et que le Champagne prenait célébrité comme vin mousseux, les raisins blancs du Chardonnay de la « Côte des blancs » prenaient peu à peu leur revanche du passé. On considère de nos jours que le «blanc de blanc» est indispensable dans la composition des cuvées destinées aux grandes bouteilles. On a appris à apprécier la finesse, le bouquet incomparable des vins des grands crus de CRAMANT, d’AVIZE, où le parfum du Chardonnay atténué par le climat de Champagne se mélange Agréablement au bouquet habituel et si subtil du Champagne. Oserai-je écrire que le blanc de blanc augmente sensible- existaient déjà au xvi* siècle comme aujourd’hui et petits vignobles de vins médiocres ». Henri GALICE, qui présidait Recherches sur l’histoire du langage

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