1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

« fauvélo t appliquées par Liébault. Ces vins, naturellement pétillants, avaient tendance à l'effervescence. Un curieux ouvrage publié vers 1674, UArt cle bien traicter, après avoir dûment célébré les vins de Champagne, ajoute : « Il ne faut pas tant se fier à cette manière de vin qui est toujours en furie et qui bouillonne sans cesse dans son vaisseau », en spécifiant que ce travail n’est que momentané : « Pasques passé, c'en est fait. » Ce léger pétillement (qui marquait seulement une étape vers la création des grands vins mousseux que nous connaissons) ne fit que stimuler, en leur fournissant un thème de plus, les poètes du xvn® siècle qui, suivant leurs devanciers du Moyen Age et de la Renaissance, entonnèrent à leur tour le los de nos vins. Les citations de La Fontaine et celles de Boileau notamment sont assez connues pour que nous nous abstenions de les rappeler. Il est cependant, dans la fameuse satire du bon Despréaux, Le Repas ridicule , une allusion, obscure pour quelques-uns, à ...certain hâbleur à la mine affamée Qui vint à ce festin, conduit par la fumée, Et qui s’est dit profès dans l’ordre des Coteaux... Il s’agit ici d’une société de fêtards, gastronomes et francs buveurs — en même temps amateurs délicats — plaisamment fondée par le marquis de Saint- Evremond et dont les membres ne voulaient voir sur leur table que des vins d’Ay, Hautvillcrs et Avenay. La faveur croissante témoignée aux vins champenois, les éloges dithyram­ biques qui leur étaient prodigués, en vers et en prose, ne pouvaient manquer d’échauffer quelque peu la bile de leurs voisins et rivaux bourguignons1. Jusqu’à la vogue récente du champagne, le bourgogne avait joui d’une primauté absolue, incontestée. Offert tout d’abord seul aux solennités des sacres, il avait été, par la suite, servi concurremment avec les vins de Champagne; enfin, ces derniers l’avaient totalement supplanté. De là une guerre, sourde d’abord, puis ouverte, la « querelle des vins », à laquelle participèrent l’art et la science, le latin et le français. Avec des alternatives de calme et d'offensives virulentes, de saillies courtoises et d’insinuations malveillantes, elle se déroula pendant la seconde moitié du XVIIe siècle. La lutte s'ouvrit d’abord sur le terrain médical, Beaune et Reims s’assé­ nant tour à tour de copieuses thèses latines, destinées à prouver que leur vin était incontestablement suavissimum ac saluberrimum , les Bourguignons accu­ sant le « vin des coteaux » de « pincer et picoter le9 parties nerveuses et de rendre sujet aux débordements, aux fluxions d’humeur et à la goutte »; les Rémois affirmant que le vin de Champagne guérissait les fièvres putrides et citant les cas de longévité merveilleuse observés chez les vignerons de leur pays. Quand les médecins furent las d’échanger, sans résultat, l'artillerie lourde de leurs dissertations, les poètes, à leur tour, entrèrent dans l'arène et — chaque parti ayant les siens — échangèrent, des années durant, poèmes didactiques et LA « QUERELLE DES VINS

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