1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

Tel a été le cas de ceux dont les vignes ne eervaient qu’à faire des vins de consommation courante pour le9 habitants du pays. Au surplus ils étaient loin d’être exclusivement vignerons; la vigne n’était qu’une de leurs cultures et généralement des moins abondantes. Si bien que, quand la généra­ lisation des moyens de transport rapides permit de faire venir à très bon compte des vins du Midi — région merveilleusement adaptée à la production en grand des vins ordinaires — ils jugèrent inutile de s’obstiner à cultiver la vigne dont le rendement était toujours aléatoire sous ce climat maussade et préférèrent consacrer toutes leurs terres à la production des céréales ou des betteraves dont l’écoulement était assuré. Par contre, les vignerons marnais se cramponnèrent... Producteurs de vins universellement connus et réputés, cotés à haut prix, réclamés en France et déjà dans toute l’Europe, ils jugèrent qu’il valait la peine de supporter coup sur coup deux, trois, parfois quatre mauvaises récoltes, dans l’expectative de la vendange rémunératrice qui finirait bien par les dédommager. Et puis, vignerons de père en fils, et rien que vignerons, ils avaient la culture de la vigne dans le sang et ne pouvaient se résoudre à l’abandonner. Le vignoble champenois subsiste donc mais bien diminué lui aussi dans sa surface et l’on peut dire que, comme la peau de chagrin légendaire, il est allé se rétrécissant d’année en année ainsi qu’en témoignent les chiffres. Si tout d’abord, pour rendre plus sensible notre démonstration, nous comparons, à cent ans d’intervalle (1832-1932), la superficie viticole de la Marne et des départements limitrophes, nous constaterons que cette superficie a diminué, considérablement mais de façon très inégale, dans ces divers départements1. Le rapprochement de ces chiffres prouve à nouveau que le vignoble champenois, — au sens très large de l’expression — était jadis producteur à la fois de vins de grands crus et de vins de consommation courante et que, seule, la production des vins de qualité a été reconnue possible sous ce climat. C’est pourquoi le9 surfaces plantées en vignes se sont relativement maintenues pour une proportion de 45 % environ dans le département de la Marne, seul capable de produire ces vins de qualité. Au contraire, ceux qui vivaient de la vente des vins de pays (une faible part de leur production servant seulement d’appoint aux cuvées marnaises dans les années de maigre récolte), ont vu leur vignoble disparaître, presque totalement pour la Seine-et-Marne et l’Aisne, dans la proportion des 4/5 pour l’Aube, dont le vignoble comporte quelques crus estimés (les Riceys notamment). Mais la diminution du vignoble marnais n’en a pas moins été considérable; de 15.834 hectares en 1880, sa superficie est tombée en 1950 à 8.650 hectares (auxquels il faudrait ajouter pour avoir la superficie totale de la Champagne 1. La Champagne en 1932. Rapport établi par la Maison Moët et Chandon, Reims, Matot, 1932. 1932 1832 590 hectares 3.230 — 7.900 hectares 16.000 — 14.930 — 19.590 — Aisne ............... Aube . ............... Seine-et-Marne Marne ............... 200 8.300

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