1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

possédés par eux. Ceux-ci sont bien loin de suffire aux besoins de leur commerce et ne les dispensent pas d'acheter aux vignerons, sous forme de raisins, le complément de ce qui leur est nécessaire; mais ces propriétés, exploitées suivant les meilleures méthodes de la culture industrielle, par de riches maisons qui n’épargnent à la vigne ni engrais coûteux, ni soins de toute nature, four­ nissent en général de remarquables têtes de cuvée. Ils constituent par ailleurs de véritables champs d’expérience dont profite l’ensemble de la communauté viticole. Ces domaines ne se rencontrent que dans les grands crus ou dans les crus secondaires de choix voisins des premiers; partout ailleurs le petit vigneron règne sans partage. Les petits —les tout petits — propriétaires vignerons demeurent donc encore les maîtres du vignoble champenois. Seulement leur nombre est en décroissance, tout comme celui de leurs vignes, et les deux phénomènes ont naturellement entre eux des rapports étroits. Dans le seul département de la Marne, le nombre des propriétaires viticul­ teurs ayant souscrit une déclaration de récolte s’élevait, en chiffres ronds, à 25.000 en 1890, à près de 20.000 en 1903; ce chiffre tombait à 18.000 en 1913 et à 13.500 en 1919. Depuis, il est demeuré fixé aux alentours de 13.000, chiffre auquel il faut ajouter, si l’on veut avoir une idée de la population vigneronne totale, environ 4.500 ouvriers vignerons dont 3.000 occupés dans les vignobles des maisons de commerce et 1.500 au service de propriétaires récoltants (mais beaucoup de ces ouvriers possèdent eux-mêmes quelques arpents de vigne et figurent, à ce titre, parmi les propriétaires récoltants). Il y a lieu de noter que sur les 13.000 propriétaires récoltants de la Marne, un peu plus de 1.200 seulement sont des « récoltants-manipulants » faisant eux-mêmes leur vin, tandis que tous les autres vendent leurs raisins au commerce. Pour l’ensemble de la Champagne délimitée (Marne, Aube, Aisne), le nombre total des propriétaires vignerons est de 18.000, et celui des manipulants de 1.400 à 1.500 suivant les années. Si la superficie du vignoble a diminué, les vignes greffées qui forment aujour­ d’hui la presque totalité de sa surface réclament des soins beaucoup plus assidus et des traitements, anticryptogamiques ou autres, plus fréquents que n’en demandaient les vieilles vignes françaises, de complexion robuste. Les besoins en main-d’œuvre sont donc loin d’être inférieurs à ce qu’ils étaient jadis et il serait faux de prétendre que le nombre des viticulteurs est en régression parce que le travail des vignes, réduites dans leur étendue, ne suffirait plus à les occuper tous. Les véritables causes de cette régression peuvent d’ailleurs se résumer dans le caractère très spécial de la culture de la vigne, culture d’un rendement essentiellement aléatoire sous le climat de Champagne et qui exige toujours, quel que soit son résultat, non seulement la même somme de travail (ce qui ne serait rien, car le vigneron marnais, comme on dit, « ne plaint pas ses 40 DIMINUTION DU NOMBRE DES PROPRIÉTAIRES VIGNERONS.

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