1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

étaient-ils plus ou moins heureux que nous?... Leur âme était plus simple et moins blasée que la nôtre, plus proche de la nature et des saisons au rythme desquelles s'accordait leur existence. Sans doute évitaient-ils ainsi quelques-uns des soucis qu’apportent avec eux le développement des connaissances, l’acces­ sion à une vie matérielle plus confortable, génératrice de plaisir nouveaux, mais aussi d’inquiétudes, de désirs toujours renouvelés et jamais assouvis... DES VIGNES AUX VENDANGEOIRS. Laissons là ces réflexions intempestives et revenons aux paniers de raisins tout fraîchement cueillis, que nous avons laissés chargés dans des voitures, en route pour les vendangeoirs du négoce. Car, nous l’avons déjà dit, l’immense majorité des petits propriétaires n’étant pas outillés pour pressurer eux-mêmes leur raisins et les transformer en vin, les vendent aux grands négociants; ceux-ci préfèrent de beaucoup cette solution qui leur permet de faire effectuer, sous leur surveillance et avec tous les soins requis, l’opération, délicate entre toutes, qu’est le pressurage. Beaucoup ont établi à demeure, dans les meilleurs crus du vignoble, des vendangeoirs contenant plusieurs pressoirs. Les raisins y sont amenés par voitures avec de grandes précautions : il importe, en effet, qu’ils ne soient pas foulés — écrasés — ou simplement trop serrés et échauffés, ces accidents pouvant provoquer un début de fermentation préjudiciable à la teinte et au bouquet du vin. LE PRESSURAGE. Arrivés au vendangeoir, les raisins sont immédiatement pesés; puis, dès qu’il y en a un marc, quantité nécessaire pour un pressurage, soit 4.000 kgs, on les étale dans la maie, sur la table ou plateau du pressoir. Les pressoirs champenois sont à la fois larges et peu élevés pour permettre au jus de traverser rapidement les peaux sans avoir le temps de se colorer à leur contact. La pression, qui peut atteindre 40.000 kilogs par mètre carré, est exercée par un plateau de chêne massif ou mouton, que commande, soit une grande roue en bois appelée calandre et mue par des ouvriers, soit un mécanisme de serrage électrique. En général un marc de 4.000 kgs donne dix pièces de cuvée : la première serre ou pressée donne 5 pièces (de 200 litres) ; on retrousse ensuite les grappes à la pelle en rejetant vers le milieu celles qui sont imparfaitement écrasées; une seconde pressée, suivie d une nouvelle retrousse, donne 3 pièces 1/2 à 4 pièces; enfin, une troisième fournit le complément, soit 1 pièce à 1 pièce 1/2. Seules ces dix pièces de cuvée seront utilisées, tout au moins par les grandes marques, pour la préparation de leurs vins de Champagne. Le moût tombe dans des cuves graduées, en bois ou en ciment, qu’on appelle bêlions ou barlons d’où il est dirigé vers d’autres cuves plus grandes. Il s’v épure durant 10 ou 12 heures, déposant les matières étrangères, débris de terre, peaux et pépins, qu’il contient : c’est le débourbage. La cuvée terminée, on obtient encore, en retroussant le marc et en le serrant à deux reprises nouvelles, d’abord une pièce et demie à deux pièces de vin dit de première taille ; puis, en renouvelant l’opération, autant de jus 51

Made with FlippingBook - professional solution for displaying marketing and sales documents online