1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

« Crus à 100 % ». (Onze crus seulement sont ainsi classés; ils figurent en capi­ tales dans notre nomenclature des diverses régions du vignoble. Y. supra, cliap. II.) Tous les prix inférieurs en découlent automatiquement; les raisins, en effet, sont vendus suivant une échelle décroissante et d’après la valeur relative des crus dont ils proviennent, à des prix correspondant à 90, 80, 75 %, etc... du prix de base. Le minimum est actuellement 65 % dans la Marne et 60 % dans le reste de la Champagne délimitée. Cette échelle des crus est très ancienne; révisée de temps à autre (notamment en 1911 et 1920), elle est communément admise dans son ensemble et n'est pas remise en question chaque année; la discussion ne porte que sur la fixation du prix de base. Elle avait lieu, avant 1914, sur place, c’est-à-dire dans les grands crus, Verzenay, Bouzy, Ay, Cramant, entre des récoltants de ces crus, désignés par­ leurs collègues, et un négociant délégué par les siens. A partir de 1919, le prix fut débattu entre les délégués du Syndicat général des Vignerons et ceux du Syndicat du commerce des Vins de Champagne. Les discussions étaient plus ou moins laborieuses; parfois même on se séparait sans avoir pu s’entendre, et les transactions se faisaient de gré à gré entre acheteurs et vendeurs. Un décret-loi du 28 septembre 1935 confia la fixation des prix de vente à une Commission spéciale, dite « Commission de Châlons », composée de délégués des vignerons, du négoce, délégués des Chambres de commerce et des Cham­ bres d’agriculture des départements de la Champagne délimitée (Marne, Aube, Aisne). Un arrêté du préfet de la Marne entérinait les décisions de ce Comité. Enfin, depuis 1941, date de la création du Comité interprofessionnel du Vin de Champagne, organe suprême et tout-puissant de la communauté champe­ noise, c’est naturellement à lui que revient cette tâche. Le C.I.V.C. a d’ailleurs modifié assez profondément la traditionnelle échelle des crus : désormais, en dessous des crus à 100 %, dits « hors classe », où le raisin est payé au prix maximum, les autres sont répartis en six catégories, pour chacune desquelles sont fixés des prix proportionnellement décroissants. Dans la sixième et dernière catégorie figurent les crus de l’Aube et la plupart de ceux de l’Aisne. Enfin — nouvel élément de discrimination permettant de tenir compte des moindres différences de qualité — à l’intérieur de chacune des cinq premières catégories, les crus ont été classés par paliers, entre lesquels les prix varient encore, quoique faiblement. □ On conçoit aisément que le vigneron attache une importance capitale à la fixation de ces prix, qui constituent l’unique revenu dont il tire sa subsistance et celle des siens, le seul dédommagement de ses peines et de ses sueurs. Malheu­ reusement, ils subissent d’une année à l’autre des fluctuations considérables, non seulement suivant l’importance de la récolte et la qualité des raisins, mais encore et surtout selon les besoins, extrêmement variables, du commerce. Si, par exemple, quelques années de mévente, coïncidant avec des récoltes abon­ dantes, ont démesurément enflé les stocks du négoce, ce dernier se montrera peu enclin à payer cher un produit dont il n’a guère besoin. Si, au contraire, les expéditions ont été actives, tandis que plusieurs récoltes successives étaient déficitaires, alors le négoce, obligé de renouveler ses réserves, aura tendance

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