1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

des noms de personnes n'ayant pas d'existence réelle. Les grandes maisons se bornent, en général, à vendre des vins portant leur nom personnel ou commer­ cial, suffisamment connu et apprécié. Par contre, beaucoup de maisons d impor­ tance secondaire ont l’innocente manie de solliciter la clientèle sous des noms divers et de déposer, à cet elTet, de multiples marques de fabrique. Ces marques sont parfois cédées à d’autres négociants et passent de mains en mains, ce qui rend en certains cas leur identification difficile. Des milliers de marques, dont beaucoup d’ailleurs ont cessé d’être exploitées par la suite, ont été ainsi dépo­ sées, la plupart aux greffes des Tribunaux de commerce de Reims et d'Epernay. Des difficultés spéciales se produisent lorsqu’il s’agit de dépôts de marques effectués par l'homonyme d'un nom précédemment déposé. Le succès obtenu par des maisons telles que « Vve Clicquot-Ponsardin » ou « Moët et Chandon » incitera tel individu qui se nommera lui-même Clicquot ou Chandon à faire le commerce des vins de Champagne, avec l’arrière-pensée de profiter du renom de la grande marque, en créant une confusion dans l’esprit des acheteurs peu avertis. Il est arrivé ainsi, en 1850, qu’un marchand de vins, plus habile que scrupuleux, en vue d'usurper la réputation du champagne Vve Clicquot, a constitué avec une personne portant le nom de Clicquot une société dont le dit Clicquot a été nommé gérant, la raison sociale étant Clicquot & C'°. Un procès ayant été intenté par la maison Vve Clicquot, la Cour de Cassation a jugé qu’il y avait lieu d’interdire complètement l’usage du nom du soi-disant gérant; ce dernier, en effet, n’ayant fait à la société aucun apport, si ce n’est celui de son nom, apparaissait comme un simple « homme de paille », un pseudo-gérant, les seuls véritables associés étant les commanditaires. Cet arrêt et quelques autres rendus sur des cas d’espèce à peu près identi­ ques, étaient motivés par les circonstances de fait toutes spéciales que nous venons d’indiquer. En général, les tribunaux ne se reconnaissent pas le droit d’interdire com­ plètement à un individu d’exercer le commerce sous son nom. Ce serait une atteinte inadmissible à la propriété des noms. Seulement, en cas d’homonymie, les tribunaux prescriront le? mesures nécessaires pour éviter une confusion préjudiciable aux droits acquis de la marque antérieurement déposée. Us déci­ deront, par exemple, que le dernier venu doit faire précéder son nom de son prénom, écrit en caractères égaux à ceux du nom, et faire suivre ce nom de la mention : « maison fondée en... ». On peut douter que ces mesures suffisent à empêcher tout risque de confusion... Pour en finir avec les négociants, nous mentionnerons, par simple esprit de justice, nue si les grandes maisons ont réalisé, surtout au cours du xix° siècle, de grosses fortunes, la plupart ont laissé derrière elles un large sillage d’œuvres charitables, d’initiatives sociales et familiales dont certaines firent, en leur temps, figure de nouveautés. Longtemps avant la législation sociale des dernières années, le personnel de leurs maisons y était suivi et encouragé par des primes, gratifications, cadeaux en nature, solennisant les grandes dates de la vie familiale — mariage, nais­ sance, première communion des enfants — et plusieurs, devançant de loin les 68 LIBÉRALITÉ DU NÉGOCE.

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