1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

place, dans le banc de craie auquel des géologues attribuent une épaisseur de plusieurs centaines de mètres, des souterrains étagés, voûtés en berceau et surmontés de vastes celliers maçonnés. La profondeur de ces caves varie de 15 à 30 mètres; leur sol calcaire, parfai­ tement sec, et la fraîcheur constante de la température (9 à 10° été comme hiver) assurent la conservation et même l’amélioration du vin. Les caves situées dans les crayéres de la butte Saint-Nicaise sont celles dont la visite procure la plus forte impression. Les plus « spectaculaires » sont, sans aucun doute, les caves Pommery : l’escalier monumental de 116 marches par lequel on s'enfonce dans le sol; les 18 kilomètres de voies souterraines dont chacune s'annonce, comme les rues d’une ville, par de grandes plaques émail­ lées portant le nom de toutes les grandes cités de l'univers où se consomme le champagne; les voûtes des galeries, interrompues, çà et là, par des sortes de « places » rectangulaires, coiffées de hautes pyramides tronquées, longues cheminées ou « essors » qui vont se rétrécissant jusqu’au sommet, d’où tombe, par un étroit vitrage, une lueur blême; enfin, les immenses parois couvertes de sculptures en ronde bosse, taillées à même la craie et représentant des sujets bachiques largement traités, il y a là de quoi surprendre des visiteurs peu préparés à ce genre de visions. Les caves Ruinart, moins étendues mais creusées jusqu’à 38 inètre9 de profondeur sur trois étages superposés, sont, elles aussi, très pittoresques. Tantôt d’une blancheur immaculée, tantôt tachetée de moi­ sissures sombres, la craie y a été laissée à l’état brut. Toutes les caves situées dans le quartier des crayéres (maisons Charles Iicidsieck, George Goulet, Hen- jiot, Piper-Heidsieck, Vve Clicquot-Ponsardin, Taittinger, etc.) offrent les mêmes éléments d'intérêt. 11 ne faudrait pas croire que celles du centre de la ville en soient dépourvues ; on y admirera l’ampleur des installations, les vastes celliers contenant les foudres colossaux dans lesquels se font les mélanges de vins, les cuves de ciment verrées où s’accumulent les grands vins des réserves, la longueur des galeries souterraines, accusée par la perspective illimitée des ampoules lumineuses qui les éclairent; les millions de bouteilles qui, sur tout le parcours, tapissent la base des murailles; les wagonnets qui roulent sur le sol, tandis que des paniers de bouteilles, accrochés à une chaîne sans fin, passent rapidement au-dessus des têtes; l’animation fébrile qui, surtout à certaines époques, fait vibrer les caves comme des ruches bourdonnantes; enfin, les diverses phases de la champagnisation, auxquelles le visiteur est initié avec une complaisance et une clarté également traditionnelles en Champagne. Epernay abrite aussi dans son sous-sol, creusé, ramifié comme une termi­ tière, les caves de ses nombreux établissements de négoce. Celles de la maison Moët et Chandon, avec leurs 19 kilomètres de développement et leurs 32 mètres de profondeur, sont parmi les plus étendues de toute la Champagne. Les appli­ cations du machinisme au travail des vins y sont particulièrement développées. Elles détiennent le record des visites de souverains et de chefs d'Etat, depuis Napoléon Ier jusqu’au président Carnot, en passant par Charles X, Louis-Phi­ lippe, etc... Quant aux caves Mercier, elles sont creusées au flanc d’un coteau dont la base est longée par la voie ferrée, ce qui facilite d’autant le chargement des wagons, alignés de plain-pied avec les celliers. On peut y voir, outre d’inté­ ressantes sculptures taillées dans la craie par le sculpteur champenois Navlet (le même qui décora les caves Pommery à Reims), un foudre colossal d’une contenance de 200.000 bouteilles, pesant à vide 20.000 kgs — sans doute the grecitest in the world — souvenir de l’Exposition Universelle de 1889, où il fut 71

Made with FlippingBook - professional solution for displaying marketing and sales documents online