1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

réserve des meilleurs millésimes, arrivent à sortir chaque année des cuvées rigoureusement identiques. Par exemple, posant en principe qu’en année normale, la cuvée se compose à peu près de 1/4 de vins de la région d’Ay, 1/4 de la Montagne versant Reims, 1/4 de la Montagne versant Epcrnay, 1/4 de blancs de la côte d’Avize, si l’année a été très chaude, donnant un vin riche et corsé, on augmentera la proportion des vins de la Montagne côté Reims et celle des vins de raisins blancs, afin d’alléger et de bouqueter rassemblagc; si, au contraire, l’année ayant été froide et pluvieuse, le vin est léger et acide, manque de corps et de plénitude, on fera appel au renfort des vins d’Ay et de Bouzy pour lui donner la vigueur qui lui fait défaut. Tout l'art consiste, en somme (et la difficulté à vaincre n’est pas mince), à jouer de toutes les nuances de bouquet, de corps, de finesse, etc..., des différents crus comme d’un véritable clavier aux résonances infinies1. » La composition de la cuvée se termine, en général, au début de mars; vient alors le tirage , ou mise en bouteilles, qui s’effectue au commencement du prin­ temps, dès que la sève entre en mouvement; car il s’agit d’utiliser cette poussée de sève, en vue d’une seconde fermentation (celle-ci en bouteille) dont le résultat doit être la formation de la mousse. LE SUCRAGE. Avant de mettre le vin en bouteilles, il faut déterminer, de façon précise, les quantités de sucre qu’il doit contenir pour acquérir une bonne mousse. S’il en contient trop, la mousse sera surabondante et sa pression fera éclater les parois du verre; s’il n’en contient pas assez, il moussera insuffisamment. Autrefois, faute de moyens permettant de mesurer exactement la quantité de sucre à ajouter au vin (compte tenu de celle qu’il possède déjà), on était constamment exposé au fléau de la casse qui sévissait sur les bouteilles et atteignait, en certaines années, des proportions désastreuses. Aujourd’hui, grâce à des procédés scientifiques, dus surtout au pharmacien François de Châlons mais perfectionnés encore après lui, il est possible de doser directement le sucre restant dans le vin après la première fermentation et de connaître ainsi la quantité à ajouter. On estime à 26 grammes environ par litre la quantité totale de sucre nécessaire pour obtenir une bonne prise de mousse. Le 6ucre est ajouté au vin non directement, mais sous la forme d'une liqueur de tirage com­ posée de vin vieux contenant une dissolution de sucre de canne. Il arrive d’ailleurs qu’on restreigne volontairement la quantité de sucre à ajouter, en vue d’obtenir des vins qui moussent très peu, qui « crèment », pour employer l’expression champenoise. Ces crémants (dont le nom n’a rien de commun avec celui du cru fameux dé Cramant) plaisent à une certaine clientèle. LE TIRAGE — CHOIX DES BOUTEILLES ET BOUCHONS. Dans les grandes maisons, le vin de la cuvée est centralisé, avant le tirage, en de vastes foudres contenant jusqu’à 3 ou 400 hectolitres chacun; on y ajoute, 1. Georges M ontorgueil , Monseigneur le Vin , tome IV. Edité par les Etablis­ sements Nicolas. 75

Made with FlippingBook - professional solution for displaying marketing and sales documents online