1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

au fur et à mesure du remplissage, la liqueur de tirage, tandis qu’un agitateur puissant brasse le liquide afin d’assurer sa parfaite homogénéité. De là, il passe dans des foudres de capacité beaucoup plus restreinte; enfin, il est pompé par des tireuses à siphons, à l’aide de tuyaux revêtus de cuivre argenté, et déversé dans des bouteilles qui se remplissent automatiquement, toujours au même niveau. Ces bouteilles, rincées à fond par des machines à grand rendement, ont été fabriquées avec beaucoup de soin par des machines automatiques (le soufflage à la bouche n’est plus qu’un souvenir), leur assurant une régularité presque parfaite de poids, de forme et de contenance. Elles doivent être, en effet, d’une égalité d’épaisseur absolue, indemnes de la moindre malformation et capables de supporter une pression de 5 à 6 atmosphères. Leur poids est d’un kilo environ et leur contenance de 80 centilitres. On sait que le commerce utilise également, mais d’une façon beaucoup moins courante : d’une part, la 1/2 cham­ penoise (40 centilitres), et même le 1/4 (20 centilitres), d’autre part, et surtout pour l’exportation, le magnum (150 centilitres), le double magnum et le jéroboam. Le choix des bouchons a, lui aussi, une extrême importance en raison des mauvais goûts qu’ils peuvent communiquer au vin; en outre, si la partie de bouchon qui pénètre dans le goulot présente le moindre plissement, la bouteille peut être « recouleusc », c’est-à-dire laisser fuir le gaz carbonique et perdre ainsi sa mousse : ce sont là deux vices rédhibitoires... Les qualités exceptionnelles requises pour le bouchage des vins mousseux ne se rencontrent guère que dans les lièges d’Espagne ou du Portugal; des expériences répétées et sérieusement contrôlées ont été faites en vue de l'utili­ sation des lièges d’Algérie; elles ont toujours donné, jusqu’à présent, des résul­ tats peu favorables. Les chênes-lièges ne produisent qu’au bout de 12 à 15 ans un liège assez épais pour qu’on y puisse tailler des bouchons d’un seul morceau. Encore ce liège doit-il, avant d’arriver à sa fin dernière, subir des séchages, des manuten­ tions et une fabrication extrêmement minutieuse. Les grandes marques n’emploient que des bouchons de tirage neufs. Les bouteilles remplies passent immédiatement au bouchage, effectué à l’aide de machines spéciales qui, tout en comprimant le bouchon sur ses côtés, l’enfoncent d’un seul coup dans le col de la bouteille, silencieusement et sans effort apparent. Le bouchon est ensuite muni d’une robuste agrafe, faite d’un gros fil d’acier demi-rond, en forme d’U renversé, dont chaque branche porte un crochet qui se fixe sous le rebord (ou bague) du goulot. Le tirage s’effectuant le plus souvent dans de vastes celliers situés au rez- de-chaussée de l’établissement, les bouteilles sont descendues dans les premières caves, soit à la main, soit par une chaîne sans fin munie de crochets destinés à recevoir des paniers de six bouteilles. Une fois en caves, les bouteilles sont entreillées, c’est-à-dire empilées en tas, dans la position horizontale. Ces immenses échafaudages de bouteilles qui tapissent les parois des caves, fragiles en apparence, sont en réalité solidement établis grâce à l’interposition entre chaque lit de bouteilles de minces lattes de bois, très habilement placées par les cavistes : cette méthode assure l’indé­ pendance parfaite des bouteilles, dont chacune peut être maniée et enlevée sans que la stabilité de l’ensemble soit compromise. 76

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