1952 Connaissance du Champagne by Maurice Hollande

CHOIX DU RÉCIPIENT. Dans quelle sorte de verre sied-il de déguster le champagne? Depuis Lien longtemps la controverse est ouverte... La traditionnelle flûte est aujourd'hui discutée, discréditée même par certains : « Bannissez de votre table la flûte ridicule », dit M. Constantin-AVeyer, généralement mieux inspiré. Ridicule? Je ne trouve pas : cette mince tige de cristal, svelte et élancée, permet de suivre, sur un long parcours, la rapide ascension des bulles de gaz qui montent sans arrêt dans la colonne liquide et viennent former à la surface une blanche collerette d’écume. La flûte est aisée à tenir, à brandir dans un toast. Le seul reproche sérieux qu‘011 puisse lui adresser vise sa contenance trop restreinte. 11 est facile d’y remédier en la rem­ plissant souvent. Personne n’ose défendre ouvertement la coupe — cette hérésie — dont l'usage s'est néanmoins répandu à la faveur des banquets « par souscription », organisés par des traiteurs qui jugèrent ces récipients d'entretien plus facile que les flûtes. La coupe a tous les désavantages : cette grande nappe de liquide, en contact avec l’air extérieur, évapore en un clin d’œil sa mousse et son bouquet; le nez n’y trouve plus rien à glaner, et le palais... pas grand’ebose. Et puis, la coupc, avec son pied trop court et le poids de son liquide oscillant dangereusement de droite et de gauche, n'est pas bien en main : l’orateur, en levant son verre pour le geste rituel, risque fort, pour peu que l’émotion fasse trembler sa dextre, de déverser, en même temps que le flot de son éloquence, une douche intempestive et glaciale sur le crâne d’un de ses voisins... De plus en plus, les préférences des amateurs éclairés vont au verre ballon ou tulipe , fait d’un cristal uni et lisse, dont le ventre, largement évasé, offre à l’œil la masse du liquide et dont le col légèrement rétréci canalise vers les narines le subtil parfum du vin. Nous ne citerons que pour mémoire ce verre bizarre, récipient de forte capacité, terminé dans le bas par une poignée sans plateau qu'on ne pouvait donc poser que renversé, c’est-à-dire vide. Ce verre était jadis employé dans les « repas de corps » pour boire à la pomponnette, exploit consistant par exemple à remplir et à vider sans désemparer douze verres de champagne pendant la sonnerie des douze coups de midi..., mais ce genre de prouesse ressortit à la gloutonnerie et non à la dégustation... Quelle qu’en soit la forme, le verre doit être transparent, indemne de tout trait gravé, guillochis ou ornement qui empêcherait d’admirer la limpidité et la couleur du vin.

LA COULEUR DU CHAMPAGNE. Cette couleur a quelque peu évolué avec le temps.

Des progrès considérables ont été réalisés : dans l’établissement des pressoirs modernes, qui ne laissent le jus des raisins en contact avec les peaux que pendant le temps, de plus en plus bref, du pressurage ; dans les méthodes mêmes de ce pressurage; enfin, dans les soins donnés immédiatement aux moûts, en vue d’éviter la tache , si fréquente autrefois et d'où résulterait la couleur d’or plus chaude des vins. 94

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