1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz

LE VIGNOBLE ET LE VIN DE CHAMPAGNE aussi qu’on distribuait chaque année plus de quinze fois la quantité d’acide phosphorique qu’exige la vigne. A Cramant, on distribuait à la vigne un peu moins de deux fois l’azote exporté, mais on lui donnait dans les maga­ sins habituellement employés près de huit fois la quantité d’acide phos­ phorique nécessaire. Cette exagération de la fumure phosphatée est, semble-t-il, le correctif qui permet l’exagération de la fumure azotée sans que la qualité du vin s’en trouve diminuée. En tenant compte des besoins de la vigne, de la façon dont elle absorbe l’azote, de la constitution des sols de la région, des résultats économiques à obtenir, nous croyons pouvoir fixer approximativement la quantité d’azote nécessaire en Champagne par hectare et par an à 80 kilos pour les crus de Pinot noir et à 60 kilos pour les crus de Pinot blanc Chardonnay; dans les sols de richesse et de constitution moyenne et sous réserve qu’on appli­ quera en même temps les chiffres que nous indiquons plus loin pour l’acide phosphorique et la potasse. L’acide phosphorique est loin d’exiger la même circonspeclion que l’azote. Il est admis que ce principe fertilisant favorise la fructification, pourvu que la vigne trouve avec lui l’azote et la potasse en quantités conve­ nables. Il est possible même que dans des sols comme ceux des vignobles champenois, l’action de l’acide phosphorique employé seul soit plus grande sur la qualité du vin que sur la quantité des raisins récoltés. Cette considération nous invite déjà à élever les doses d’acide phos­ phorique, maïs nous y serons d’autant plus invités encore, si nous son­ geons que l’acide phosphorique quel que soit l’engrais phosphaté employé, se trouve toujours dans le sol sous une forme peu soluble et qu’il est absorbé irrégulièrement pendant la végétation de la vigne. Les chiffres d’acide phosphorique donnés habituellement dans les fumures montrent que nous sommes ici d’accord avec la pratique. En appliquant à la vigne une quantité d’azote de 60 à 80 kilos par an et par hectare, nous conseillons ici d’apporter en même temps 50 ou 60 kilos d’acide phosphorique quoique la vigne n’en exporte pas plus de 20 kilos par an. Quant à la potasse, son rôle est aussi fort intéressant. La potasse, indépendamment de son rôle dans la production, préside à la fabrication du sucre de la vigne. C’est dans les feuilles, grâce à la lumière solaire et à cette matière verte qui colore les feuilles, que les bota­ nistes nomment la chlorophyllie, que s’élaborent les corps qui, finalement, donneront le sucre du raisin. Dans cette fonction merveilleuse, qu’on appelle fonction chlorophyllienne, la potasse a un rôle encore obscur dans ses détails, mais constaté cependant, aussi faut-il l’apporter aux sols de nos vignobles qui n’en sont pas abondamment pourvus. J’estime que nous donnerons toute satisfaction à la vigne champenoise en apportant par hectare et par an 80 à 100 kilos de potasse dans les crus de Pinot noir et 60 kilos dans les crus de Pinot blanc Chardonnay.

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