1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz

LE VIGNOBLE ET LE VIN DE CHAMPAGNE Pour extraire ces différentes fractions du moût voici comment on pro­ cède : Les raisins, n’étant pas foulés, opposent une assez grande résistance à la pression et le tirage de la cuvée demande une certaine surveillance, afin d’éviter que, sous l’éclatement trop brutal des grains de raisin, les différentes parties du jus, que le principe du fractionnement cherche à séparer, ne se mélangent. A la première serre, dès que l’écoulement se ralen­ tit, on procède à la retrousse du marc. Cette opération consiste, après avoir remonté le mouton et retiré les claies du pressoir, à couper sur une largeur d’environ 0 m. 25, avec des pelles en bois, les raisins de la périphérie les moins écrasés, et à les rejeter sur le milieu du marc. On serre à nouveau, et on effectue une seconde retrousse. Une troisième serre entraîne une troisième retrousse. Dans une année normale on doit obtenir ainsi en une heure et demie à deux heures, les 20 hectolitres (10 pièces) qui représentent la « cuvée » d’un marc de 4.000 à 4.200 kilos. Après l’extraction de la cuvée, on procède encore à une ou deux retrous­ ses du marc et on le serre après chaque retrousse pour obtenir le vin de « première taille ». Puis l’opération répétée donne le vin de « seconde taille ». Enfin, le marc, pioché à l’aide de crocs, est reformé pour être serré à fond et fournit le vin de rebêche ». Dans les installations modernes, pour gagner du temps, on enlève le marc après les secondes tailles et on le porte sur un pressoir puissant, qui extrait la rebêche pendant qu’on prépare le pressoir à recevoir un nouveau marc. 'La cuvée seule est utilisée régulièrement pour la préparation des grandes marques de Champagne. Une partie des première tailles peut faire également des Champagnes très fins en accompagnant la cuvée en certaines années, surtout dans la Côte des Blancs. Les tailles de blanc, vinifiées seules, peuvent réussir des Champagnes fort agréables, mais qui ne sont pas susceptibles de se conserver longtemps. Un dégustateur peut d’ailleurs facilement reconnaître le goût de taille dans un Champagne. Le plus sou­ vent des tailles de grands crus servent à des coupages avec les vins de crus secondaires qui leur apportent la forme d’acidité qui leur manque, tandis qu’elles apportent elles-mêmes le bouquet des crus supérieurs. Quant aux rebêches, suivant la tradition ancienne, elles ne doivent pas entrer dans le Champagne. C’est pour les éliminer que le décret du 28 sep­ tembre 1935 a limité la proportion de moût à extraire de la vendange. Elles ont d’ailleurs une âpreté particulière. La fragmentation des moûts en Champagne, au moment du pressurage, est une coutume très ancienne. Elle semble avoir précédé la préparation du Champagne mousseux et avoir été suggérée par le désir de préparer avec les raisins noirs des vins aussi blancs que possible et d’une grande finesse. Tous les œnologues qui ont étudié la vinification en Champagne sont d’ac­ cord pour justifier cette pratique. Emile MANCEAU, qui a suivi les opé- — 348 —

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