1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz

LA VINIFICATION CHAMPENOISE

LA PRISE DE MOUSSE OU SECONDE FERMENTATION EN BOUTEILLE

La théorie de la prise de mousse a été exposée de façon magistrale par Emile MANCEAU en s’appuyant sur une définition du « Vin mousseux naturel » qu’il donna dans un rapport présenté au premier Congrès du froid à LYON en 1909, et dont voici le texte : « Le vin est le produit de la fermentation complète ou incomplète du raisin frais ou jus de raisin frais (Congrès de la Croix blanche de Genève 1908). « Cette définition s’applique aux vins mousseux comme aux vins non mousseux. « Mais tandis que ces derniers peuvent s’obtenir par une seule fermen­ tation alcoolique en récipients ouverts, les premiers vins sont le résultat de deux fermentations successives l’une en récipients ouverts, l’autre en bouteilles hermétiquement closes. « Cette double fermentation caractérise les vins mousseux naturels dont les vins de Champagne représentent la forme la plus parfaite >. Après avoir étudié les principes généraux des deux fermentations, nous avons vu comment se réalisait en fûts la première. La seconde fermentation se présente en Champagne avec des condi­ tions de milieu qui sont très différentes de celles qui président à la pre­ mière, car les bouteilles hermétiquement closes dont fait état Emile MANCEAU dans sa définition du vin mousseux naturel, ne mettent à la disposition des levures qu’une bien faible quantité d’air. Le milieu est alcoolique, et, si la présence de l’alcool est une cause d’élimination des ferments nuisibles, elle ralentit la vie des bonnes levures déjà gênées dans leur multiplication par la faible quantité d’air dont elles disposent. Le sucre est surtout du sucre ajouté sous la forme de sucre de canne non fermentescible directement. A mesure que la fermentation se poursuit, l’acide carbonique s’accumule dans le vin en proportion élevée, et ce gaz, qui est la caractéristique du vin mousseux, est un élément qui gêne les levures. La meilleure preuve en est donnée par les jus de raisins mousseux conservés sous pression d’acide carbonique. Enfin l’expérience a démontré que, pour obtenir la mousse très fine et un vin de Champagne plus bouqueté, la seconde fermentation en bouteilles devait être effectuée à température basse, soit entre 10 et 15 degrés. Et cette température est une cause de ralentissement très notable de la fermentation. Ces conditions font comprendre pourquoi l’adaptation des levures est nécessaire. Il est merveilleux de trouver dans les levures de Champagne les dispositions naturelles qui favorisent cette adaptation, et que, dès le xvxi* siècle, dom PERIGNON, et peut-être d’autres parmi ses contemporains, ont cherché à utiliser en les développant.

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