1951 Le Vignoble et le Vin de Champagne by Georges Chappaz
LA VINIFICATION CHAMPENOISE ment, profilant de la poussée de cette bulle, il fait sauter le bouchon avec son dépôt. L’opération s’effectue en face d’une guérite à dégorger constituée par un petit tonneau ayant une large ouverture dans laquelle le bouchon et le dépôt sont projetés. Le vin de dégorgement s’écoule dans un baquet ou un second tonneau placé sous la guérite. De la bouteille redressée s’échappe la mousse, qui achève de laver le goulot pendant que l’ouvrier sent s’il n’y a pas de mauvaise odeur dans cette mousse et s’assure de la limpidité du vin. Immédiatement, la bou teille passe sur un tourniquet où un bouchon de caoutchouc maintenu par un ressort assez puissant maintient la pression pendant le temps néces saire à ce qu’un ouvrier la reprenne pour en refaire le plein. Depuis déjà longtemps dans les maisons où l’expédition est importante, on emploie le dégorgement à la glace qui rend l’opération beaucoup plus facile et réduit en même temps la perte de pression et la perte de vin. Dans le dégorgement à la glace, les bouteilles sont placées au-dessus d’un bac rempli d’un liquide réfrigérant. Les cols des bouteilles plongent dans ce liquide de telle sorte qu’il se forme un bouchon de glace adhérent au bouchon de liège et emprisonnant le dépôt. Bouchon de liège et bouchon de glace sont expulsés facilement avec le dépôt. Le froid limite le déga gement de la mousse. Le dégorgement ayant produit un vide dans la bouteille, on introduit immédiatement après la liqueur d*expédition pour doser le vin. La liqueur d’expédition se prépare normalement en mélangeant, dans une pièce de 200 litres, 150 kilos de sucre candi de canne et 105 litres de vin. Cette liqueur contient 750 grammes de sucre par litre. On en prépare parfois à un titre un peu plus faible. Pour les très grands vins, l’idéal est à notre avis de préparer la liqueur d’expédition avec le meme vin que celui qui emplit les bouteilles. Ainsi on est certain de ne rien modifier au bouquet futur du Champagne, ni à sa constitution. Une liqueur plus alcoolique que le vin où elle est versée peut en modifier la constitution en provoquant des précipités, très légers évidem ment, mais qui suffisent à mécontenter les grands connaisseurs. Mais pour beaucoup de vins moyens, la liqueur est préparée avec des vins vieux très bouquetés de façon à améliorer sinon la qualité de l’ensemble du vin, du moins l’impression si agréable que produit le bouquet développé par la mousse. Suivant la nature du vin et les désirs de la clientèle, on verse dans chaque bouteille de un à dix centilitres de liqueur. Les grands vins destinés aux connaisseurs sont peu dosés, ce sont les vins « bruts », « extra secs » ou « extra drg », « secs » ou « drg », qui sont dosés de 1 à 4 %. Mais la proportion évaluée en pour cent est en réalité pour 80, c’est-à-dire la conte nance de la bouteille, soit 80 centilitres. De plus en plus d’ailleurs, la clien tèle des Champagnes s’est orientée depuis une vingtaine d’années vers les vins secs. Les vins bruts doivent être réservés pour les vins de grandes années et de grands crus destinés à être conservés longtemps. Le vieillis- — 365 —
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